Possibilité d’annulation d’un contrat public en référé précontractuel sans analyser les conséquences pour l’intérêt public
Dans son arrêt du 18 mai 2021 (CE, 18 mai 2021, n°448618), le Conseil d’Etat considère que si le juge des référés a la possibilité de ne pas suspendre l’exécution de toute décision relative à la passation d’un contrat public en raison des conséquences négatives qu’il pourrait en résulter, notamment au regard de l’intérêt public, n’oblige pas le juge à rechercher une atteinte à l’intérêt public si l’annulation du contrat est justifiée.
En l’espèce, une commune a lancé un avis d’appel à concurrence en vue de la passation, dans le cadre d’une procédure adaptée, d’un accord-cadre à bons de commande. Une des sociétés évincées a saisi le juge des référés pour faire annuler la procédure de passation au stade de l’examen des offres et enjoindre à la commune, si elle entendait poursuivre l’attribution du marché, de reprendre la procédure à ce stade. Le juge des référés ayant fait droit à la demande, la commune se pourvoit en cassation.
En droit, l’article L551-1 du code de justice administrative permet d’exercer un référé précontractuel visant à empêcher la signature d’un contrat pour méconnaissance des grands principes de la commande publique qui causerait un préjudice. Le juge ordonne alors de se conformer aux obligations de publicité et mise en concurrence. Ce référé ayant un effet suspensif, le contrat ne peut pas être signé avant que le juge se soit prononcé.
Par ailleurs, selon l’article L551-2 du même code, le juge des référés a la possibilité de ne pas suspendre l’exécution de « toute décision qui se rapporte à la passation du contrat lorsqu’il estime, en considération de l’ensemble des intérêts susceptibles d’être lésés et notamment de l’intérêt public, que les conséquences négatives résultant de telles mesures de suspension pourraient l’emporter sur leurs avantages ».
Toutefois, le juge peut suspendre la décision s’il estime que les manquements relevés doivent avoir pour conséquence l’annulation de la procédure.
En l’espèce, la commune aurait manqué à ses obligations de transparence et de mise en concurrence dans la notation des offres en ne portant pas à la connaissance des candidats la pondération des sous-critères relatifs à l’appréciation de la valeur technique des offres.
Par conséquent, le Conseil d’Etat considère que le juge des référés n’a pas commis d’erreur de droit et n’a pas insuffisant motivé son ordonnance en ne recherchant pas d’office si des considérations d’intérêt public faisaient obstacle à la reprise de la procédure au stade des offres. Ayant estimé que les manquements relevés devaient avoir pour conséquence l’annulation de la procédure, le juge a pu suspendre l’exécution de la procédure de passation.
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