Motivation et respect des garanties procédurales par un arrêté interruptif de travaux
Dans un arrêt du 3 février 2022 (CAA de Marseille, 3 février 2022, n°19MA02347), la cour administrative d’appel de Marseille indique qu’un arrêté interruptif de travaux en raison de leur illégalité par rapport au PLU constitue une mesure de police devant être motivée.
En l’espèce, le maire avait un délivré un permis de construire pour une maison individuelle. Or des agents municipaux ont constaté l’accomplissement de travaux non conformes au permis. Un procès-verbal de constat d’infraction au code de l’urbanisme a été dressé.
Le maire a informé l’intéressé de son intention de prendre un arrêté interruptif de travaux. Le propriétaire a formé un recours gracieux ayant reçu un refus implicite du maire. La Cour administrative d’appel considère alors que la décision du maire d’interrompre les travaux aurait du être motivée.
En droit, selon l’article L480-2 du code de l’urbanisme, en cas de constatation d’une infraction aux règles d’urbanisme, le maire, après avoir dressé un procès-verbal, peut ordonner l’interruption des travaux par un arrêté motivé.
« (…) / Dès qu’un procès-verbal relevant l’une des infractions prévues à l’article L. 480-4 a été dressé, le maire peut également, si l’autorité judiciaire ne s’est pas encore prononcée, ordonner par arrêté motivé l’interruption des travaux. Copie de cet arrêté est transmise sans délai au ministère public. »
Il ressort des articles 121-1, 121-2 et 121-3 du code des relations entre le public et l’administration, qu’une décision individuelle défavorable doit être motivée et soumise au respect d’une procédure contradictoire préalable. Sauf demande abusive, l’administré doit pouvoir présenter ses observations écrites et orales sur la situation.
Une décision ordonnant l’arrêt des travaux constitue une mesure de police, doit donc être motivée et intervenir après que l’intéressé ait été mis à même de présenter ses observations écrites, et orales s’il le souhaite.
« 4. Il résulte de ces dispositions que la décision par laquelle le maire ordonne l’interruption des travaux au motif qu’ils ne sont pas autorisés par le document d’urbanisme en vigueur, décision qui est au nombre des mesures de police qui doivent être motivées, ne peut intervenir qu’après que son destinataire a été mis à même de présenter ses observations, sauf en cas d’urgence ou de circonstances exceptionnelles. Le respect de cette formalité implique que l’intéressé ait été averti de la mesure que l’administration envisage de prendre, des motifs sur lesquels elle se fonde, et qu’il bénéficie d’un délai suffisant pour présenter ses observations. Ces dispositions font obligation à l’autorité administrative de faire droit, en principe, aux demandes d’audition formées par les personnes intéressées en vue de présenter des observations orales, alors même qu’elles auraient déjà présenté des observations écrites. Ce n’est que dans le cas où une telle demande revêtirait un caractère abusif qu’elle peut être écartée. »
Rappelons que, selon la jurisprudence Danthony (CE, 23 décembre 2011, Danthony, n°335033), un vice affectant une procédure administrative n’est de nature à entacher d’illégalité la décision prise que s’il ressort des pièces du dossier qu’il a été susceptible d’exercer une influence sur le sens de la décision prise ou qu’il a privé les intéressés d’une garantie.
En l’espèce, si le propriétaire a été invité par courrier à présenter ses observations dans un délai de 72h, il a informé la commune qu’il était en déplacement professionnel. A ce titre, il a demandé un rendez-vous pour faire part de ses observations orales. Cette demande de rendez-vous n’étant pas abusive, la mesure d’interruption de travaux ne présentant pas un caractère d’urgence et aucune circonstance exceptionnelle ne s’opposant à cette demande, le maire a méconnu les règles de procédure contradictoire préalable. Le propriétaire a alors été privé d’une garantie. Il est donc fondé à demander l’annulation de l’arrêté entaché d’illégalité.
Pour toutes problématiques relatives au droit de l’urbanisme, contactez Maître Aurélien PY, avocat en droit public à GRENOBLE et à GAP et intervenant sur l’ensemble du territoire français pour défendre les collectivités territoriales, les promoteurs et constructeurs et les particuliers.