A l’approche d’une assemblée générale de copropriété, vous pouvez confier votre mandat impératif à un mandataire.
Ce mandat peut être un pouvoir en blanc ou bien, il peut contenir des instructions précises de voter dans un sens déterminé.
Le mandataire n’est pas forcément tenu de respecter ce mandat lors du vote à l’assemblée générale de copropriété, car le contrat de mandat est conclu entre le mandant et le mandataire.
En revanche, le syndicat de copropriétaires est tiers au contrat de mandat.
Vous pouvez néanmoins être tenté de contester le procès-verbal d’assemblée générale de copropriétaires.
Il faut être opposant ou défaillant pour contester l’assemblée générale de copropriété
Sachez que la recevabilité de cette action est soumise au fait que vous ayez été soit opposant soit défaillant lors de l’assemblée générale de copropriété, c’est-à-dire que vous avez été absent ou avez voté contre la résolution litigieuse.
En effet, il résulte des dispositions d’ordre public de l’article 42 de la loi du 10 juillet 1965 que seuls les copropriétaires opposants ou défaillant peuvent contester les décisions prises en assemblée générale de copropriétaires.
Autrement dit, si vous avez confié un mandant impératif, et qu’il n’a pas été respecté, vous pourriez être considéré comme irrecevable par le tribunal judiciaire.
Comment vous défendre néanmoins en cas de non-respect du mandat impératif donné lors d’une assemblée générale de copropriété ?
Mais la question n’est pas toujours si tranchée.
La jurisprudence de la Cour de cassation
En effet, si le mandataire s’est servi de votre vote en fraude de vos droits, vous pourriez être recevable à contester le procès-verbal d’assemblée générale de copropriété.
La Cour de cassation reconnaît que le fait pour un mandataire, de se servir du pouvoir donné par un mandant pour, de manière délibérée, faire procéder à un vote sur des questions qui contrevenaient aux intérêts de son mandant, constitue une utilisation dolosive et malicieuse du pouvoir établi dans le seul but de nuire à ses intérêts (voir en ce sens : Cour de cassation, 2ièmeCiv., 21 mai 2014, n°13-15.550).
« Mais attendu qu’ayant relevé que Mme X…, qui était en conflit ouvert et durable avec la société Caisse d’épargne, ne pouvait se servir du pouvoir donné par cette société pour bloquer le fonctionnement de la copropriété, et pour, de manière délibérée, faire procéder à un vote sur des questions qui contrevenaient aux intérêts de son mandant, la cour d’appel a pu retenir, par motifs propres et adoptés, que Mme X… avait usé de façon dolosive et malicieuse du pouvoir établi par la société Caisse d’épargne dans le seul but de nuire à ses intérêts et a, par ces seuls motifs, légalement justifié sa décision » ;
L’apport de la doctrine
Par ailleurs, la doctrine s’est intéressée à la question du mandat impératif lors de l’assemblée générale de copropriété et considère que celui-ci doit être respecté.
Dans un article intitulé « Mandat impératif, faut-il légiférer ? », Monsieur Gilles ROUZET, conseiller honoraire à la Cour de cassation, se prononçait pour un retours aux articles 1989 et 1998 du code civil en droit de la copropriété, soulignant qu’il n’existait pas de dispositions particulières dérogatoires au code civil relatives aux modalités d’exécution du mandat en droit de la copropriété (voir en ce sens : « Mandat impératif, faut-il légiférer ? », Gilles ROUZET, conseiller honoraire à la Cour de Cassation, Revue Loyers et copropriété – Octobre 2015).
Aux termes de l’article 1989 du code civil « Le mandataire ne peut rien faire au-delà de ce qui est porté dans son mandat : le pouvoir de transiger ne renferme pas celui de compromettre ».
Selon l’article 1998 du code civil : « Le mandant est tenu d’exécuter les engagements contractés par le mandataire, conformément au pouvoir qui lui a été donné.
Il n’est tenu de ce qui a pu être fait au-delà, qu’autant qu’il l’a ratifié expressément ou tacitement ».
Monsieur ROUZET relevait du reste, que la jurisprudence était taisante sur cette question : « seules les questions de preuve des consignes données ont été judiciairement tranchées à ce jour ».
En outre, comme le rappelle Monsieur ROUZET dans son étude, la Cour de cassation admet également un autre cas dans lequel vous pouvez être recevable comme opposant à la résolution contestée.
Ainsi, le mandant est bien qualifié d’opposant dès lors que « le copropriétaire, représenté à l’assemblée générale, avait émis des réservées sur la validité de cette assemblée, les avait renouvelées dans le pouvoir remis au secrétaire de séance et dont le mandataire s’était abstenu de prendre part aux votes » (voir en ce sens : Cour de cassation, 3ièmeCiv., 10 septembre 2008, n°07-16.448).
Et de conclure : « la teneur du conclusif qui évoque l’ignorance des réserves contenues dans le mandat et la décision de la Cour de cassation de publier l’arrêt montrent à l’évidence que cet élément méritait à ses yeux un examen ».
Encore, l’auteur de l’article précité constate que la piste de la fraude a été utilisée par la Cour de cassation, compte tenu de ce que les décisions adoptées en défaveur du mandant « contrevenaient de manière spécifique aux intérêts de X puisque, précisément, elles portaient sur les points de litige les opposant et faisant parallèlement l’objet de procédures judiciaires ».
« Autrement dit, il y avait là conflit d’intérêt viciant les rapports entre délégant et délégué ».
D’autres auteurs se prononcent également en faveur de l’impérativité de la délégation de vote :
- C. Atias, Guide de la copropriété des immeubles bâtis. Edi. Edilaix 2005, n°924 ;
- F. Givord, C. Giverdon & P. Capoulade, La copropriété : éd. Dalloz Action 2012-2013, p. 145, n°829 : « La loi ouvre très largement à l’ensemble des copropriétaires la faculté de se faire représenter. Aucune règle n’exclut en ce domaine et ne conditionne le recours à une délégation de vote. Les textes organisent par ailleurs une information jugée suffisante pour les propriétaires de lots sur les questions à débattre. D’autant que les assemblées générales ne sont autorisées à se prononcer que sur les questions figurant à l’ordre du jour donc nécessairement portées à leur connaissance. Enfin, le recours au mandat impératif viendrait compléter les prohibitions édictées à l’encontre du syndic de copropriété de représenter directement ou par personnes interposées et éviterait à ce dernier de tenter de peser sur le vote des participants à l’assemblée générale ».
Ainsi, dans le cas où une délibération vous est particulièrement préjudiciable, il convient de bien analyser votre situation afin de se prévaloir des situations admises par la Cour de cassation ou invoquer les articles du code civil relatif au mandat.
Agir contre votre mandataire lors de l’assemblée générale de copropriété
En tout état de cause, il sera parfaitement possible d’engager une action contre le copropriétaire qui n’aurait pas respecté les instructions que vous lui avez clairement données sur le fondement des dispositions des articles 1984, 1985, 1986, 1987, 1988, 1989 et 1998 et suivants du code civil et de demander réparation des préjudices subis sur le fondement contractuel (articles 1231 et suivants du code civil).
La syndicat des copropriétaires pourrait demander réparation du préjudice au mandataire
De même, le syndicat des copropriétaires pourrait tout à fait demander réparation à son encontre puisque la Cour de cassation reconnaît que le tiers à un contrat peut invoquer, sur le fondement de la responsabilité délictuelle, un manquement contractuel dès lors que ce manquement lui a causé un dommage (voir en sens: Cass. Ass. plén., 6 octobre 2006, n° 05-13.255, Bull. 2006, Cour de cassation, Assemblée plénière, 13 janvier 2020, n°17-19.963).
Contacter Me Aurélien PY
Maître Aurélien PY, avocat en droit public et droit de l’urbanisme au Barreau de Grenoble, vous accompagne pour contester une assemblée générale de copropriétaires :
– Cabinet de GRENOBLE : https://www.py-avocat.fr/avocat-droit-public-grenoble/
– Cabinet de GAP : https://www.py-avocat.fr/avocat-droit-public-gap/
– Compétences en droit de l’urbanisme : https://www.py-avocat.fr/droit-urbanisme-grenoble/