Contester un permis de construire est une démarche qui peut être engagée par des voisins ou des personnes impactées par un permis de construire, pour diverses raisons.
Cette procédure est encadrée par des règles conçues pour garantir la légalité et la conformité des constructions aux normes d’urbanisme et aux droits de propriété.
Maître Aurélien PY, avocat en droit de l’urbanisme, vous propose d’en savoir plus sur les différentes étapes et les motifs pour contester un permis de construire ainsi que sur les effets qui peuvent résulter de cette contestation.
Sur quelles bases juridiques peut-on contester un permis de construire ?
Pour contester un permis de construire, il est primordial de se référer aux textes législatifs et réglementaires en vigueur.
Les articles L.600-1 à L.600-5-2 du Code de l’urbanisme fixent les dispositions relatives au contentieux de l’urbanisme, certaines étant applicables à la contestation des autorisations d’urbanisme. A cet égard, l’article L.600-1-2 dispose que « toute personne justifiant d’un intérêt à agir peut contester un permis de construire ».
L’intérêt à agir peut prendre différentes formes, depuis la protection de ses droits de propriété à la préservation de l’environnement en passant par la jouissance du bien ou si le projet de construction et/ou d’aménagement vient affecter ses conditions d’occupation.
Un permis de construire, peut être contesté sur différents fondements et juridictions :
DEVANT LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF :
Les règles relatives à l’urbanisme et issues du Code de l’urbanisme, du document local d’urbanisme tel que le PLU ou la carte communale, ou encore les risques naturels :
- Le non-respect des règles d’urbanisme issues du Plan Local d’Urbanisme (PLU) ou Plan d’Occupation des Sols (POS), de la carte communale ou du Règlement national d’urbanisme (RNU) ;
- L’atteinte aux sites et paysages protégés et notamment la construction dans une zone classée ou protégée sans respecter les contraintes associées.
- L’impact sur la biodiversité, telle qu’une atteinte aux espèces protégées et à leurs habitats.
- La pollution et les nuisances, notamment le risque de pollution des sols, de l’air ou de l’eau, ou encore l’émission de nuisances sonores, olfactives ou lumineuses.
- Le non-respect des normes environnementales tel que le manquement aux obligations liées à l’évaluation environnementale ou le non-respect des normes de performance énergétique et de développement durable.
- Les risques naturels, par exemple la construction dans une zone à risque (inondation, glissement de terrain, incendie de forêt) sans prendre en compte les mesures de prévention.
- L’incompatibilité avec les plans de prévention : Plan de Prévention des Risques Naturels (PPRN) ou Plan de Prévention des Risques Technologiques (PPRT).
Le non-respect des autorisations environnementales : absence ou insuffisance d’autorisations spécifiques (ex. autorisation de défrichement).
DEVANT LE TRIBUNAL JUDICIAIRE :
Les fondements sont les règles de droit privé tels que le droit de propriété, les troubles anormaux de voisinage, le cahier des charges du lotissement ;
- Les troubles anormaux de voisinage : il s’agit des nuisances directes qui affecte la propriété : bruit, odeurs, perte d’ensoleillement, perte de vue, perte de valeur vénale ;
- L’existence de servitudes de droit privé : cela concerne par exemple la violation de servitudes de vue, de passage ou de non-construction affectant les propriétés voisines ;
- Le respect des règles de copropriété : règlements de copropriété, notamment en ce qui concerne l’aspect extérieur des bâtiments ou des constructions nouvelles ;
- Le respect du cahier des charges de valeur contractuelle ;
- Le respect des droits de propriété tel que l’empiètement sur une propriété privée, par exemple ;
Quels peuvent être les motifs de contestation d’un permis de construire ?
La contestation d’un permis de construire, peut être motivée par une multitude de raisons qui, pour être recevables, doivent faire apparaître les motifs suivants :
Une méconnaissance des règles d’urbanisme :
La méconnaissance des règles d’urbanisme est un motif important de contestation d’un permis de construire.
Il s’agit du non-respect des règles du Plan Local d’Urbanisme (PLU) (règles écrites ou règles graphiques) ou des règles édictées par le Code de l’urbanisme, ainsi que des règles du Plan de prévention des risques naturels.
Par exemple, une construction qui ne respecte pas les distances minimales par rapport aux limites séparatives peut être annulée par une décision de justice du Tribunal administratif.
Une atteinte aux droits de propriété
Un permis de construire peut aussi être contesté s’il porte atteinte aux droits des tiers, comme :
- L’empiètement sur la propriété privée ;
- La Méconnaissance d’un cahier des charges d’un lotissement de valeur contractuelle ;
- Les Troubles anormaux de voisinage tels qu’une perte de vue, une perte d’ensoleillement, une perte de luminosité, une perte d’intimité et une perte de valeur vénale ;
À titre d’exemple, une construction qui obstrue la vue ou qui crée des nuisances sonores ou visuelles peut être contestée.
L’article 544 du Code civil dispose à cet égard que « la propriété est le droit de jouir et de disposer des choses de la manière la plus absolue, pourvu qu’on n’en fasse pas un usage prohibé par les lois ou les règlements ».
Dans cette hypothèse, un recours peut être engagé :
- Devant le Tribunal administratif, chargé d’examiner la légalité d’une autorisation d’urbanisme par rapport au PLU ou à la carte communale ;
- Devant le Tribunal judiciaire compétent pour protéger la propriété privée ;
Le défaut d’information et d’affichage permet-il l’annulation d’un permis de construire ?
Non.
Le défaut d’affichage du permis de construire sur le terrain est un motif courant de contestation. Selon l’article R.424-15 du Code de l’urbanisme, l’affichage doit être effectué de manière visible de la voie publique pendant toute la durée du chantier.
Pourtant, malgré une croyance répandue, un affichage irrégulier ou incomplet ne permet pas d’obtenir l’annulation du permis.
Celui-ci a simplement un impact sur le point de départ du délai de deux mois pour engager un recours gracieux ou contentieux. Le délai de 2 mois court à compter de l’affichage de l’autorisation d’urbanisme (déclaration préalable, permis d’aménager, permis de construire) sur le terrain.
Un impact environnemental
Les constructions susceptibles de présenter des incidences significatives et néfastes sur l’environnement peuvent être contestées : par exemple, absence d’étude d’impact préalable.
L’absence ou l’insuffisance de cette étude constitue un motif de contestation. L’article L.122-1 du Code de l’environnement impose cette obligation pour les projets qui affectent potentiellement l’environnement.
D’autres motifs environnementaux peuvent être avancés tels que :
- L’atteinte aux sites et paysages protégés :
- Construction dans une zone classée ou protégée (sites naturels, monuments historiques) ;
- Altération d’un paysage remarquable ou d’un site inscrit ;
- L’impact sur la biodiversité en se fondant sur les études d’impact environnemental ou les avis des autorités compétentes (comme la DREAL) :
- Atteinte aux espèces protégées et à leurs habitats ;
- Dégradation des écosystèmes naturels et des corridors écologiques ;
- La pollution et les nuisances s’il contrevient aux normes environnementales et de santé publique :
- Risque de pollution des sols, de l’air ou de l’eau ;
- Émission de nuisances sonores, olfactives ou lumineuses ;
- Le non-respect des normes environnementales :
- Manquement aux obligations liées à l’évaluation environnementale (absence d’étude d’impact, études insuffisantes).
- Non-respect des normes de performance énergétique et de développement durable ;
- L’existence de risques naturels :
- Construction dans une zone à risque (inondation, glissement de terrain, incendie de forêt) ;
- L’incompatibilité avec les plans de prévention :
- Non-respect des prescriptions des Plans de Prévention des Risques Naturels (PPRN) ou des Plans de Prévention des Risques Technologiques (PPRT).
- Le non-respect des autorisations environnementales :
- Absence ou insuffisance d’autorisations spécifiques (par exemple, autorisation de défrichement, permis de défrichement).
Quelles sont les procédures de contestation d’un permis de construire ?
La contestation d’un permis de construire suit une procédure précise qui se déroule en plusieurs étapes :
1. La phase précontentieuse
Avant de saisir un Tribunal, il est recommandé de tenter une résolution amiable, qui peut permettre d’engager des discussions avec le titulaire du permis ou la commune.
Cela peut à trouver une solution sans recourir au contentieux.
Des discussions amiables confidentielles peuvent également se poursuivre par l’intermédiaire des avocats des parties pendant le temps du recours contentieux pour mettre fin à l’amiable au recours.
2. Le recours administratif
Ce type de recours préalable constitue une étape facultative avant de saisir le Tribunal administratif.
Il doit être adressé à l’autorité ayant délivré le permis, généralement le Maire ou le Préfet, et être formulé dans un délai de deux mois à compter de la date d’affichage du permis sur le terrain.
Une copie intégrale du recours doit également être adressée au bénéficiaire de l’autorisation d’urbanisme. A défaut, le recours est irrecevable.
Le silence gardé par l’administration pendant plus de deux mois vaut rejet implicite du recours selon l’article R.600-2 du Code de l’urbanisme.
3. Le recours en contentieux
Si le recours administratif est rejeté, il est possible d’introduire un recours contentieux devant le Tribunal administratif et / ou devant le Tribunal judiciaire suivant les questions en litige.
Le recours contentieux doit être introduit dans les deux mois suivant la réponse, ou l’absence de réponse, de l’administration au recours administratif.
Le requérant doit justifier d’un intérêt à agir, c’est-à-dire prouver que le permis contesté porte atteinte à ses droits ou à son environnement ; produire la preuve de sa propriété ou de son occupation.
Le requérant doit également développer l’ensemble des moyens de contestation du permis de construire :
- moyens de forme et de procédure ;
- moyens portant sur la légalité du permis de construire lui-même, notamment par rapport aux règles de l’autorisation d’urbanisme et des risques naturels.
Le Tribunal examine alors la légalité du permis de construire, en fonction des dispositions règlementaires mais également de la jurisprudence établie par le Conseil d’État.
Le délai moyen est d’environ 1 an et demi.
Quels sont les effets de la contestation d’un permis de construire ?
La contestation d’un permis de construire peut produire différentes conséquences et effets :
- La suspension du permis
La suspension du permis de construire peut-être demandée en référé, c’est-à-dire en urgence.
Celle demande doit faire l’objet d’une requête distincte qui sera jugée en urgence. Elle peut aboutir à la suspension de l’exécution du permis de construire, ce qui signifie que les travaux ne pourront pas commencer ou ne pourront pas se poursuivre pendant le délai d’instruction de la requête par le Tribunal administratif.
Le juge des référés peut ordonner la suspension si le recours apparaît sérieux et si la réalisation du projet porte atteinte de manière grave et immédiate aux droits du requérant selon l’article L.521-1 du Code de justice administrative.
- L’annulation du permis
Si le recours est fondé, le Tribunal administratif peut annuler le permis de construire. Cette annulation a un effet rétroactif, ce qui signifie que le permis est réputé n’avoir jamais existé.
Le juge administratif dispose également de pouvoirs de régularisation : il peut ordonner de revoir certains points problématiques du permis de construire, mais qui sont régularisables par le dépôt d’un permis de construire modificatif par exemple.
Contester un permis de construire est un processus complexe qui nécessite une bonne maîtrise des règles d’urbanisme, des droits de propriété et des diverses procédures administratives et contentieuses.
Pour engager une telle démarche, il convient donc de faire preuve de vigilance quant aux délais et formalités à respecter et de développer un argumentaire issu de textes législatifs et réglementaires et de la jurisprudence. Pour toute démarche de contestation d’un permis de construire,Maître Aurélien PY vous propose son accompagnement dans toute la France, pour maximiser vos chances de succès.