Eoliennes et monuments historiques: Un permis de construire d’éoliennes peut-il être refusé en raison de la co-visibilité avec des monuments historiques ?
CE, 22 septembre 2022, 455658 ;
Quelle est la règle discutée ?
L’article R. 111-27 du Code de l’urbanisme permet de refuser ou d’accepter sous réserve de l’observation de prescriptions spéciales, une autorisation d’urbanisme, si les constructions, par leur situation, leur architecture, leurs dimensions ou l’aspect extérieur des bâtiments ou ouvrages à édifier ou à modifier, sont de nature à porter atteinte au caractère ou à l’intérêt des lieux avoisinants, aux sites, aux paysages naturels ou urbains ainsi qu’à la conservation des perspectives monumentales.
Le Conseil d’Etat rappelle les modalités d’application de l’article R. 111-27 du Code de l’urbanisme.
Il précise que pour rechercher l’existence d’une atteinte de nature à fonder le refus de permis de construire ou les prescriptions spéciales accompagnant la délivrance de ce permis, il appartient à l’autorité administrative compétente d’apprécier :
- la qualité du site sur lequel la construction est projetée et d’évaluer,
- l’impact que cette construction, compte tenu de sa nature et de ses effets, pourrait avoir sur le site et notamment, le cas échéant, la covisibilité du projet avec des bâtiments remarquables, quelle que soit la protection dont ils bénéficient par ailleurs au titre d’autres législations.
La balance d’intérêts divers en présence, autres que ceux mentionnés par cet article et, le cas échéant, par le plan local d’urbanisme de la commune est exclue.
Il s’agit des principes dégagés par sa jurisprudence du 13 juillet 2012, n° 345970, Association Engoulevent.
Quelles sont les raisons du refus du permis de construire ?
Par un arrêté du 28 octobre 2016, le Préfet a refusé, sur le fondement de l’article R. 111-27 du Code de l’urbanisme, de délivrer à l’exploitant d’une éolienne l’autorisation d’exploiter un parc de cinq éoliennes, au regard de l’atteinte portée aux sites environnants.
En l’espèce, la décision de refus du préfet est motivée sur la co-visibilité avec des monuments historiques protégés au titre des abords, alors même que le projet, visible depuis le site protégé d’Alesia, le parc de Buffon à Montbard, certaines sections du canal de Bourgogne, et de monuments historiques inscrits, se situait en dehors du périmètre des 500 mètres autour des monuments historiques protégés.
La Cour administrative d’appel de LYON (CAA Lyon, 17 juin 2021, n° 18LY03943) avait considéré que le fait de se fonder sur la co-visibilité du projet avec des immeubles protégés au titre des abords alors que le projet se situe au-delà du rayon des 500 mètres conduirait à une extension non prévue de cette protection était illégal et a annulé le refus du préfet.
Contrairement à la Cour, le Conseil d’Etat, dans l’affaire du 22 septembre 2022, n°455658 , a considéré que pour apprécier aussi bien la qualité du site que l’impact de la construction projetée sur ce site, il appartient à l’autorité administrative, sous le contrôle du juge, de prendre en compte l’ensemble des éléments pertinents lorsqu’elle apprécie la qualité du site puis l’impact de la construction, notamment le cas échéant, la co-visibilité du projet avec des bâtiments remarquables.
Ainsi, pour l’application de l’article R. 111-27, il convient de confronter le projet au site dans lequel il va s’insérer, et uniquement cela, en faisant abstraction de toute autre règle ou considération.
Il ne faut donc pas assimiler la co-visibilité au sens de la protection des abords prévue par l’article L. 630-1 du Code du patrimoine, et la co-visibilité pour l’application de l’article R. 111-27 du Code de l’urbanisme, permettant d’apprécier l’impact du projet sur le site.
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