Un projet de loi confortant les principes républicains vient d’être présenté en Conseil des ministres.
Des mesures importantes concernent le renforcement du principe de neutralité des services publics et un contrôle accru des associations.
Un renforcement du principe de neutralité de services publics
> Dans les contrats de la commande publique et des services publics
Le projet de loi étend le principe d’égalité des usagers et les principes de laïcité et de neutralité du service public à l’exécution des marchés publics et aux services publics confiés par la loi ou le règlement à un organisme de droit public ou de droit privé.
Ainsi, les salariés devront s’abstenir de manifester leurs opinions et leurs convictions religieuses et traiter de manière égale toutes les personnes.
Le titulaire du marché public devra de plus, s’assurer de la bonne application du principe à ses sous-traitants. Le contrat doit préciser les modalités de contrôle et les sanctions en cas de non-respect d’application de ces principes.
Dans son « Avis sur un projet de loi confortant le respect, par tous, des principes de la République », le Conseil d’État reconnaît l’utilité de ces mesures au regard des manquements régulièrement constatés à ces principes. Il propose en outre de faire apparaître les mesures à mettre en place pour le respect de ces obligations et identifier et faire cesser tout manquement.
> Dans les actes et décisions des collectivités territoriales
Les décisions des collectivités territoriales devront également respecter strictement le principe de neutralité dans les services publics tels que par exemple les équipements sportifs, les cantines ou les bibliothèques.
Les actes de nature à porter gravement atteinte au principe de neutralité des services publics et ceux qui méconnaissent l’obligation de refuser ou de retirer une subvention à une association du fait de l’incompatibilité du fonctionnement de celle-ci avec l’engagement républicain, pourront être sanctionnés par un mécanisme nouveau permettra d’assurer l’effectivité du principe.
Le Préfet pourra en effet saisir le tribunal administratif et assortir sa demande d’un référé-suspension (article L. 1410-0-1 CGCT). Si la collectivité territoriale n’exécute pas les mesures prescrites par le juge des référés, il pourra désormais se substituer à la collectivité à ses frais. Cette disposition instaure un mécanisme de « carence républicaine » de nature à sanctionner ou à protéger selon les cas, les élus locaux contre toute pression communautaire.
Le Conseil d’Etat propose que l’appréciation de l’existence d’actes portant gravement atteinte au principe de neutralité des services publics relève du juge dans le cadre d’un« déféré accéléré » qui s’étendrait aux décisions de nature à porter gravement atteinte au principe de neutralité des services publics.
Un contrôle accru des associations
> Des subventions conditionnées à la signature d’un engagement républicain
Le projet de loi confortant les principes républicains crée une ngagement républicain pour les associations subventionnées. Selon la version corrigée par le Conseil d’État, ces dernières devraient s’engager à respecter les principes de la République, au rang desquels figurent le respect de la dignité de la personne humaine, l’égalité notamment entre les femmes et les hommes, la fraternité et la sauvegarde de l’ordre public, et la liberté.
La collectivité devra refuser ou retirer la subvention accordée si l’objet ou le fonctionnement de l’association sont incompatibles avec l’engagement républicain.
Un réforme des associations organisant l’exercice du culte
Les associations cultuelles instaurées par la loi du 9 décembre 1905 ne peuvent recevoir de subventions, mais bénéficient d’avantages fiscaux (possibilité de recevoir des dons et legs, réductions d’impôt pour leurs donateurs, baux emphytéotiques administratifs, exonération de la taxe foncière et d’une partie de la taxe d’aménagement.
Leur contrôle est renforcé dans un but de protection de l’ordre public.
D’abord, pour éviter d’éventuelles prises de contrôle par une minorité et assurer une meilleure information de leurs membres, les statuts de l’association devront prévoir un organe délibérant pour décider de l’adhésion d’un nouveau membre, la modification des statuts de l’association, la cession de tout bien immobilier et, le cas échéant, le recrutement d’un ministre du culte.
Ensuite, pour éviter que les associations en pratique non cultuelles, ne bénéficient des avantages fiscaux afférents aux associations cultuelles, un régime de contrôle préalable du caractère cultuel de l’association était proposé. Le Conseil d’État recommande plutôt une procédure de déclaration par laquelle l’association justifie de sa qualité cultuelle. Le Préfet pourrait s’opposer aux avantages liés à la qualité cultuelle, voire les retirer après une procédure contradictoire.
Les ressources des associations cultuelles sont renforcées pour assurer leur indépendance
Celles-ci auront la possibilité de posséder et administrer tous immeubles acquis à titre gratuit pour en tirer des revenus.
La transparence sur les fonds et leur origine est accentuée pour garantir un meilleur contrôle
Les associations devront ainsi réaliser un bilan, un compte de résultat et une annexe qui pourront être contrôlés par le Préfet. Elles auront l’obligation de tracer les sommes reçues et leurs conditions d’affectation.
Des sanctions pénales à l’encontre du dirigeant ou de l’administrateur sont prévues en cas de manquement à ces principes.
Disposition attendue, les ressources provenant de l’étranger seront contrôlées par le tenue d’un état séparé et d’une certification des comptes, que le Conseil d’État propose de déclencher à compter d’un certain seuil.Dans le même sens, les avantages en numéraire ou en nature provenant de l’étranger ainsi que les libéralités supérieurs à 10 000 euros, devront être déclarés l’autorité administrative qui pourra s’y opposer et en exiger la restitution.
Là encore, des sanctions pénales sont prévues en cas de refus de respecter les obligations de déclaration.
Des obligations nouvelles sont imposées aux associations loi 1901 à objet mixte.
Situation particulièrement contestable, celles-ci bénéficiaient indirectement de subventions aux cultes pourtant interdites pour les associations cultuelles par la loi du 9 décembre 1905.
Celles-ci seront enfin soumises aux mêmes obligations que celles imposées aux associations cultuelles. Elles devront établir des comptes comprenant un bilan, un compte de résultat et une annexe et présenter isolément les activités en relation avec l’exercice du culte. Une obligation de certification des comptes est prévue pour l’ensemble de leurs activités lorsqu’elles délivreront, à raison de leur activité non cultuelle, des reçus fiscaux permettant à leurs donateurs de bénéficier d’une réduction d’impôt. Elles aussi seront astreintes à la tenue des comptes et des ressources en provenance de l’étranger.
Enfin, le Préfet pourra, s’il constate qu’une association accomplit des actes en relation avec l’exercice public d’un culte alors que cela n’est pas inscrit dans son objet, adresser une mise en demeure afin qu’elle mette son objet en conformité avec ses activités, sous peine d’astreinte d’un certain montant par jour de retard…
En conclusion, le projet de loi confortant les principes républicains semble être un texte riche et utile, qui sera prochainement soumis au Parlement. Reste que celui-ci pourrait encore évoluer, à l’instar de la procédure de déféré-laïcité[1] particulièrement contestée par les élus.
Vous êtes une collectivité publique ou une association, Me Aurélien PY, avocat expert en droit public à GRENOBLE et à GAP, vous assiste dans toutes vos problématiques et procédures
[1]« Séparatismes : les élus locaux sur la défensive »,Par Mathilde Elie Romain Gaspar, La Gazette des Communes ; https://www.lagazettedescommunes.com/712005/separatismes-les-elus-locaux-sur-la-defensive/?abo=1