CE, 27 janvier 2020, Toulouse métropole, n°422104 : Résiliation anticipée d’une délégation de service public et indemnisation des biens de retour
Cet arrêt s’inscrit dans la continuité de la jurisprudence Commune de Douai, n° 34278, qui pose la définition et le régime des biens de retour dans les délégations de service public et les concessions de travaux.
Les biens de retour sont les biens revenant obligatoirement au concédant en fin de concession, et qui sont regardés comme étant le propriétaire ab initio (voir en ce sens: CE, 28 juin 1889, Compagnie des chemins de fer de l’Est), et de manière gratuite, tant que le bien en question a été entièrement amorti (voir en ce sens: CE, 9 novembre 1895, Ville de Paris).
Par principe, les biens nécessaires à l’exploitation du service sont regardés comme des biens de retour.
Ainsi, dans les cas de résiliation du contrat avant son terme normal, et lorsque les biens de retour n’ont pu être totalement amortis, le délégataire a le droit de demander l’indemnisation du préjudice qu’il subit à raison de ce retour anticipé.
Le juge précise que cette indemnisation doit être calculée en référence à la valeur nette comptable, et distingue selon que :
– l’amortissement des biens a été calculé sur la base d’une durée d’utilisation inférieure à la durée du contrat : l’indemnité sera égale à la valeur nette comptable inscrite au bilan ;
– la durée d’utilisation était supérieure à la durée du contrat : l’indemnité sera égale à la valeur nette comptable qui résulterait de l’amortissement de ces biens sur la durée du contrat ;
De plus, l’arrêt Commune de Douai prévoit la possibilité pour les cocontractants de déroger à ces principes, à condition que cela ne conduise pas à une somme supérieure à celle résultant du calcul de « droit commun ».
En l’espèce, la métropole de Toulouse avait résilié, à compter du 1er janvier 2013, le contrat signé en 1991 par lequel la commune de Saint-Orens avait concédé jusqu’au 30 septembre 2020 les services publics de l’eau et de l’assainissement, au délégataire, devenu Suez eau France.
Le juge applique le principe de la valeur nette comptable en tant que référence du calcul de l’indemnisation des biens retours.
Il précise également, que le « moyen tiré de ce que ces biens auraient été économiquement amortis avant la résiliation du contrat grâce aux résultats de l’exploitation de la concession » est inopérant (voir en ce sens: CE, 27 janvier 2020, Toulouse métropole, n°422104).
Enfin, concernant la loi Sapin et l’encadrement de la durée des délégations de service public, le juge réaffirme que ces nouvelles dispositions n’ont pas de conséquence sur le calcul de l’indemnité relative aux biens de retour. Il avait déjà été jugé que ces dernières ne provoquaient pas la nullité des contrats antérieurement conclus, mais n’avaient pour seul effet que de rendre irrégulière leur exécution une fois expirée la nouvelle durée légale (voir en ce sens: CE, ass., 8 avr. 2009, Compagnie générale des eaux, Commune d’Olivet, n° 271737).
Ainsi, ces dispositions « ne font pas obstacle à l’application des règles définies (…) en cas de résiliation d’un contrat conclu antérieurement. Par suite, la cour n’a pas commis d’erreur de droit en jugeant inopérant le moyen tiré de ce que la durée de la concession de service public litigieuse aurait excédé la durée maximale autorisée par la loi. » (voir en ce sens: CE, 27 janvier 2020, Toulouse métropole, n°422104).
Le principe de la valeur nette comptable est donc réaffirmé et renforcé.
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