« En cas de déféré du préfet ou de recours contentieux à l’encontre d’un certificat d’urbanisme, ou d’une décision relative à l’occupation ou l’utilisation du sol régie par le présent code, le préfet ou l’auteur du recours est tenu, à peine d’irrecevabilité, de notifier son recours à l’auteur de la décision et au titulaire de l’autorisation. Cette notification doit également être effectuée dans les mêmes conditions en cas de demande tendant à l’annulation ou à la réformation d’une décision juridictionnelle concernant un certificat d’urbanisme, ou une décision relative à l’occupation ou l’utilisation du sol régie par le présent code. L’auteur d’un recours administratif est également tenu de le notifier à peine d’irrecevabilité du recours contentieux qu’il pourrait intenter ultérieurement en cas de rejet du recours administratif ».
Cet article du code de l’urbanisme, signifie que l’auteur du recours est tenu, à peine d’irrecevabilité, de notifier son recours, dans les 15 jours de sa présentation, à l’auteur de la décision et au titulaire de l’autorisation. Cela vaut aussi bien pour un recours gracieux que pour un recours contentieux, c’est-à-dire devant un Tribunal.
L’irrecevabilité issue de l’absence de notification d’un tel recours constitue un moyen d’ordre public, c’est-à-dire que la requête serait irrecevable, ce que le juge administratif pourrait décider (soulever d’office le moyen).
Dans cette affaire, une SCI et une association ont demandé au tribunal administratif de Toulouse d’annuler pour excès de pouvoir la décision par laquelle le maire de la commune de Toulouse a refusé de retirer l’arrêté par lequel il a accordé à une Société un permis de construire et l’arrêté par lequel il a délivré à cette même société un permis de construire modificatif pour le même projet immobilier.
Le tribunal administratif de Toulouse a rejeté leur demande.
Dans leur pourvoi en cassation, ils sollicitent l’annulation du jugement rejetant leurs demandes.
Le Conseil d’État estime que la décision refusant de retirer un permis de construire constitue, pour l’application de l’article R. 600-1 du Code de l’urbanisme, une décision relative à l’occupation ou l’utilisation du sol.
Dès lors, il appartient à l’auteur d’un recours contentieux dirigé contre une décision refusant de retirer un permis de construire de notifier ce recours à l’auteur de la décision contestée et au titulaire de l’autorisation la preuve de la notification doit être adressée au greffe de la juridiction où le recours contentieux a été enregistré.
Le juge doit rejeter le recours comme irrecevable, lorsque son auteur, après y avoir été invité par lui, n’a pas justifié de l’accomplissement des formalités requises par ces dispositions.
Dans cette affaire, les pièces du dossier ne comportaient pas la preuve de la notification par les requérants de leur recours à l’auteur de la décision et au titulaire de l’autorisation, ni d’une invitation que le tribunal administratif de Toulouse leur aurait adressée de produire.
Ainsi, le tribunal, en ne s’assurant pas du respect de la formalité prévue à l’article R. 600-1 du code de l’urbanisme, a statué irrégulièrement.
Par conséquent, le Conseil d’État a annulé le jugement du tribunal administratif de Toulouse pour ce motif.
Réglant l’affaire au fond, le Conseil d’État rejette la demande des requérants comme irrecevable.
En synthèse, les requérants étaient irrecevables à agir du fait de la méconnaissance de l’obligation de notification du recours introduit à l’encontre de la décision de refus de retrait de permis de construire litigieuse.
L’intérêt à agir contre une autorisation d’urbanisme s’apprécie au regard des constructions environnantes dans leur état à la date d’affichage en mairie de la demande du pétitionnaire et non au regard de circonstances postérieures.
« Une personne autre que l’État, les collectivités territoriales ou leurs groupements ou une association n’est recevable à former un recours pour excès de pouvoir contre une décision relative à l’occupation ou à l’utilisation du sol régie par le présent code que si la construction, l’aménagement ou le projet autorisé sont de nature à affecter directement les conditions d’occupation, d’utilisation ou de jouissance du bien qu’elle détient ou occupe régulièrement ou pour lequel elle bénéficie d’une promesse de vente, de bail, ou d’un contrat préliminaire mentionné à l’article L. 261-15 du code de la construction et de l’habitation.
Le présent article n’est pas applicable aux décisions contestées par le pétitionnaire ».
Conformément à l’article L. 600-1-3 du code de l’urbanisme, sauf pour le requérant à justifier de circonstances particulières, l’intérêt pour agir contre un permis de construire, de démolir ou d’aménager s’apprécie à la date d’affichage en mairie de la demande du pétitionnaire.
Dans cette affaire, la collectivité de Saint-Barthélemy a délivré un permis de construire à une Société pour la construction d’un restaurant de plage comprenant une boutique, une cave à vin et un bar, ainsi que d’un parc de stationnement semi-enterré, après démolition de l’habitation présente sur le terrain à l’exception de la citerne conservée pour le projet. Une Société voisine, propriétaire d’une villa située sur des parcelles, dans le même quartier, a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Saint-Barthélemy la suspension de l’exécution de la délibération accordant le permis, ainsi que celle de la décision rejet de son recours gracieux.
Par une ordonnance du 20 janvier 2022, le juge des référés du tribunal administratif de Saint-Barthélemy a rejeté sa demande comme irrecevable pour défaut d’intérêt pour agir. Le juge s’est notamment fondé sur la densification du bâti dans le secteur d’implantation du projet en raison de la construction, en cours à la date de son ordonnance, d’une résidence de tourisme de cinq logements sur un terrain adjacent à la parcelle d’assiette du projet, par ailleurs située à deux parcelles du terrain de la société requérante.
Le Conseil d’État annule la décision du juge des référés et considère que :
« sauf circonstances particulières, l’intérêt pour agir d’un requérant contre un permis de construire s’apprécie au vu des circonstances de droit et de fait à la date d’affichage en mairie de la demande du pétitionnaire, sans qu’il y ait lieu de tenir compte de circonstances postérieures, qu’elles aient pour effet de créer, d’augmenter, de réduire ou de supprimer les incidences de la construction, de l’aménagement ou du projet autorisé sur les conditions d’occupation, d’utilisation ou de jouissance mentionnées à l’article L. 600-1-2 »,
Il considère également que l’appréciation doit être réalisée au vu des constructions environnantes dans leur état à cette date.
Il estime en conséquence que le juge des référés a entaché son ordonnance d’une erreur de droit car à la date d’affichage de la demande de permis de construire de la société bénéficiaire, cette résidence de tourisme n’avait pas été construite, l’instruction de la demande de permis de construire correspondante était alors en cours.
Ainsi, même si l’environnement du projet contesté a évolué, le juge doit apprécier l’impact de la construction sur les intérêts du requérant au regard des constructions environnantes dans leur état à la date d’affichage en mairie de la demande du pétitionnaire et non au regard de circonstances postérieures
Dans quelles circonstances un permis de construire modificatif peut-il être utilisé ?
Le Maire d’une commune délivre par arrêté au pétitionnaire, un permis de construire modificatif du permis qui lui avait été accordé initialement en 2015, pour la construction d’un ensemble immobilier de trois logements.
La requérante demande au Tribunal administratif :
L’annulation pour excès de pouvoir de l’arrêté de 2018 portant permis de construire modificatif du permis initialement accordé en 2015.
Décision implicite du maire refusant de retirer cet arrêté
Le tribunal administratif ayant rejeté cette demande en 2019, la requérante se pourvoit en cassation.
Le Conseil d’État considère que :
« L’autorité compétente, saisie d’une demande en ce sens, peut délivrer au titulaire d’un permis de construire en cours de validité un permis modificatif, tant que la construction, que ce permis autorise, n’est pas achevée, dès lors que les modifications envisagées n’apportent pas à ce projet un bouleversement tel qu’il en changerait la nature même. »
« En estimant que ces modifications avoient pu faire l’objet d’un permis modificatif, le tribunal a porté sur les faits qui lui étaient soumis une appréciation souveraine exempte de dénaturation ».
Ainsi, cet arrêt nous apporte des précisions :
> Si le pétitionnaire souhaite modifier des éléments importants de son projet, du moment que la nature de ce dernier reste identique, il n’est plus nécessaire de déposer une demande d’un nouveau permis initial.
> Ce qui relevait initialement du seul permis de construire modificatif pour régularisation s’applique désormais à tout permis modificatif.
COMPETENCE POUR EXAMINER LA LEGALITE DU PERMIS DE REGULARISATION.
Dans le cas où les opposants au projet souhaitent contester ce permis modificatif, ils doivent le faire dans le cadre de l’instance principale dirigée contre le permis initial, conformément aux dispositions de l’article L.600-5-2 du Code de l’Urbanisme :
Le Maire d’une commune, délivre, par un arrêté, un permis de construire à une société pour l’édification d’un immeuble de 39 logements, de locaux commerciaux et de la création de trente-quatre aires de stationnement.
Des requérants, voisins du projet, demandent au Tribunal administratif de Lyon d’annuler pour excès de pouvoir ledit arrêté litigieux. Par un premier jugement, le Tribunal fait droit à leur demande et annule donc le permis de construire.
Le Conseil d’État a annulé ce jugement et renvoyé l’affaire devant le tribunal administratif.
Par un nouveau jugement : le tribunal administratif a annulé l’arrêté litigieux sur un point qui méconnaît le a) de l’article 10.3 UC du règlement du plan local d’urbanisme. Le dernier étage du projet excède le tiers de la surface moyenne des étages (rez-de-chaussée non inclus)
Ainsi le tribunal accorde au maire de la commune de Lyon un délai de trois mois pour solliciter un permis de construire modificatif régularisant le projet sur ce point. Or, à la date où le permis de construire modificatif a été délivré, le jugement qui invitait la commune à régulariser son autorisation en sollicitant un tel permis a été frappé d’un pourvoi en cassation par les requérants.
Le maire de Lyon délivre à la société ledit permis de construire modificatif. Les requérants saisissent le tribunal administratif de Lyon d’un recours pour excès de pouvoir contre ce permis de construire modificatif.
Le problème juridique soulevé est le suivant : Devant quel juge faut-il aller pour contester un permis de régularisation lorsque le jugement qui a ordonné cette mesure est déjà contesté devant le Conseil d’État ?
La légalité s’apprécie à la date du permis de modificatif. Qui est compétent pour examiner la légalité du permis de régularisation ?
Le Tribunal administratifinitialement saisi ?
OU
Le Conseil d’État s’il décide de régler l’affaire au fond après avoir annulé le jugement du TA ?
Les requérants ne peuvent pas faire valoir que les modifications apportées au projet ne permettraient pas de le rendre conforme aux dispositions locales du PLU en vigueur à la date du permis de construire initial.
Les requérants ne sont pas fondés à demander l’annulation du permis de construire modificatif, ce permis ayant régularisé le vice entachant le permis de construire initial.
Cet arrêt du Conseil d’État apporte des précisions sur les points suivants :
Durant la procédure d’examen d’un recours dirigé contre un permis de construire, le juge peut inviter le pétitionnaire à régulariser un élément de son projet en sollicitant un permis modificatif.
Dans le cas où les opposants au projet souhaitent contester ce permis modificatif, ils doivent le faire dans le cadre de l’instance principale dirigée contre le permis initial, conformément aux dispositions de l’article L.600-5-2 du Code de l’Urbanisme :
Cet arrêt apporte aussi des précisions sur la détermination du périmètre situé autour d’une gare au sein duquel les obligations de réalisation des places de stationnement sont allégées :« Doivent être regardés comme situés à moins de cinq cents mètres d’une gare ou d’une station de transport, au sens des dispositions rappelées ci-dessus, les projets se trouvant à l’intérieur d’un rayon de cinq cents mètres calculés à partir de cette gare ou de cette station ».
La société requérante s’est pourvue en cassation contre le jugement du tribunal administratif de Grenoble en date du 14 juin 2022 en soutenant, notamment, que ce jugement serait entaché d’irrégularité en l’absence de clôture d’instruction ou d’information en ce sens.
Le juge administratif avait fixé la clôture de l’instruction au 14 mai 2021. Par deux courriers du 6 et du 10 mai, les parties ont été informées par le tribunal qu’il était susceptible de surseoir à statuer pour permettre la régularisation de deux vices dont le permis était entaché et les a invitées à présenter leurs observations dans un délai de six jours pour le premier courrier, de quatre jours pour le second. La commune a répondu par un mémoire du 12 mai, mis à disposition des autres parties sur Télérecours le 17.
La haute juridiction précise que « si le juge administratif doit, lorsqu’il invite les parties à produire des observations sur la mise en œuvre des dispositions de l’article L. 600-5-1 du code de l’urbanisme, leur laisser un délai suffisant à cette fin, le délai dans lequel il communique aux autres parties les observations qui lui sont présentées en réponse à cette invitation est, en revanche, eu égard à l’objet de cette invitation, sans incidence sur la régularité de la procédure. Par suite, les requérantes ne peuvent utilement soutenir que les observations présentées par la commune de Thonon-les-Bains en réponse à l’invitation faite par le tribunal leur auraient été communiquées tardivement ».
Ainsi, un délai suffisant doit être laissé aux parties, en revanche , le délai dans lequel la juridiction communique aux autres parties les observations qui lui sont présentées en réponse à cette invitation est sans incidence sur la régularité de la procédure.
Le Conseil d’Etat estime que lorsque le juge administratif, alors qu’il envisage de faire usage des pouvoirs qu’il tient de l’article L. 600-5-1 du code de l’urbanisme, invite les parties à produire des observations, ni cette invitation, ni la communication par le juge des observations reçues en réponse à cette invitation n’ont, par elles-mêmes, pour effet de rouvrir l’instruction si elle était close.
Dans cette affaire, la société Immotour, spécialisée dans l’activité de marchand de biens, avait fait l’achat d’un ancien établissement hôtelier pour un montant de 1 000 000 €.
Elle a souhaité revendre l’immeuble au prix de 1 095 000 euros et le maire de la commune a décidé le 28 août 2012, de mettre en œuvre le DPU au prix de 800 000 €. Toutefois, les installations étant en très mauvais état, la commune y a renoncé par une décision du 17 juillet 2013.
Le 7 août 2014, la société a cédé le bien, mais seulement au prix de 400 000 €.
La société Immotour a recherché la responsabilité de la commune de Saverne au titre de l’illégalité dont la décision de préemption aurait été entachée et de la faute résultant de la renonciation à préempter.
Par un jugement du 28 juin 2018, le tribunal administratif de Strasbourg a condamné la commune de Saverne à verser à la société Immotour la somme de 436 669,86 euros, assortie des intérêts et de leur capitalisation, en réparation du préjudice résultant de l’illégalité de la décision de préemption.
Sur l’appel de la commune de Saverne et de la société Immotour, la CAA de Nancy, par un arrêt du 24 octobre 2019, a annulé ce jugement rejetant ainsi les demandes de la société.
Dans son pourvoi auprès du Conseil d’État, la société s’est fondé sur le régime de la responsabilité sans faute, d’ordre public c’est-à-dire qu’il peut être invoqué pour la première fois en cassation.
La décision reconnait que la société requérante a subi un préjudice « grave » et « spécial ». La condition de gravité se trouve satisfaite, dès lors que le préjudice excède « les aléas ou sujétions que doivent normalement supporter des vendeurs de terrains situés en zone urbaine ».
Cependant, le Conseil accorde à la société une indemnité de 150 000 €, lui reprochant son abstention à prendre des mesures destinées à assurer le gardiennage de son bien avant le mois de septembre 2013 afin d’éviter l’occupation irrégulière et que le bien fasse l’objet de dégradation et considère qu’il s’agit d’une « imprudence dans l’appréciation des risques de nature à exonérer la commune d’une partie des conséquences dommageables de la renonciation à la préemption ».
Dès lors, la responsabilité sans faute d’une commune peut être engagée du fait de décisions légales de préemption, puis de renonciation à l’exercice de ce droit lorsque le requérant peut se prévaloir d’un préjudice « grave » et « spécial ».
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